Si j’te lance un poème
Sauras tu l’attraper
Avant que ne s’essaiment
Les mots sur la jetée
Tu sais ils sont trop libres
Pour pouvoir les garder
Et je manque d’équilibre
Pour te les repêcher
Les mots viennent et s’en vont
Ils écrivent leur histoire
Finissent en chanson
Ou tâches sur le buvard
Tu les lis un instant
Une fois le livre fermé
Ils prennent la clé des champs
Et s’effacent du papier
Tu les fredonnes un peu
La chanson terminée
Elle te dira adieu
Et tu l’as oubliée
Si j’te lance un poème
Sauras tu l’attraper
Avant qu’au matin blême
Les vers partent en fumée
Tu sais ils brûlent les doigts
Des poètes maudits
Qui les croisent parfois
Au milieu de la nuit
Les rimes d’autrefois
Écrites à la chandelle
Deviennent des cendres en soie
Baudelaire étincelle
Tu crois bien les connaître
Affable La Fontaine
Victor Hugo, en maître
Et Rimbaud quitte Verlaine
J’essaye d’en semer là
De façon bien médiocre
C’est ma manière à moi
De faire briller le toc
Alors si tu l’attrapes
Il fera ton bonheur
Et même si tu le rates
Il touchera ton cœur…